Rencontre avec Lena Georgescu à la maison des associations du club d’échecs de Berne. Ce bâtiment discret est situé directement sous le Kornhausbrücke et n’est séparé de l’Aar que par un chemin piétonnier. La triple championne suisse s’y est déjà entraînée de nombreuses heures. L’étudiante en informatique de 24 ans a appris à jouer aux échecs dès l’âge de cinq ans avec son père d’origine roumaine. Elle vient de rentrer d’un tournoi par équipes à Thuringe. Elle a joué 8 manches sur 9, passant ainsi plus de 32 heures devant l’échiquier.

Combien de temps a duré ta plus longue partie d’échecs?

J’ai déjà participé à quelques rencontres qui ont duré six à sept heures. En moyenne, une partie dure entre trois et quatre heures. Récemment, j’ai gagné un match en seulement une heure et demie. C’est un record pour moi également.

Et que se passe-t-il si un jour tu n’es pas en forme?

La plupart du temps, ce n’est qu’en cours de partie que je réalise que je suis dans un mauvais jour. Ensuite, j’adapte mon jeu en plaçant mes pièces dans des positions plus simples. Outre la forme physique et mentale, il est également important de dormir suffisamment et de se ressourcer entre les parties. C’est très énervant lorsque je domine la partie pendant plus de cinq heures et finis par perdre à cause d’un mauvais coup.

Quel est le rôle de l’alimentation?

Dans la vie de tous les jours, je n’y fais pas spécialement attention, mais lors des tournois, je mange léger, car les repas copieux fatiguent. Pendant une partie, nous sommes autorisés à manger et à nous dégourdir les jambes. J’ai entendu un jour un collègue dire que son adversaire avait dévoré un poulet entier pendant le match.

Les échecs sont-ils un jeu réservé aux personnes intelligentes?

Pour bien jouer aux échecs, il n’est pas nécessaire d’être un génie. C’est un peu comme apprendre une langue. C’est plus facile quand on est enfant, on peut alors aller très loin. Plus tard, il est difficile d’atteindre un niveau élevé. Il est important non seulement d’apprendre les coups par cœur, mais aussi de les comprendre. Je reconstitue et analyse la plupart des parties perdues.

Tu as une figure préférée?

C’est l’une des questions les plus fréquente, mais que le joueur d’échec ne se pose jamais. Car si tu as une préférence, tu fais des choix qui ne sont pas optimaux. Avec mon style de jeu plutôt «agressif», je trouve toutefois plus facile d’attaquer avec la dame.

Qu’est-ce que tu souhaiterais encore accomplir?

Je suis déjà championne de la FIDE (Fédération internationale des échecs), c’est pourquoi je me concentre maintenant sur le titre suivant, le titre de championne internationale. Rares sont ceux qui deviennent grands maîtres. Pour y parvenir, il faut miser à fond sur les échecs.

Quel est ton message à propos du nouveau timbre-poste sur les échecs?

Les échecs sont un jeu pour tous. Il est important de lever les inhibitions liées au jeu d’échecs. Les gens doivent prendre conscience que les échecs sont aussi amusants que n’importe quel jeu de société. En tant que femme dans un domaine traditionnellement masculin, je suis évidemment ravie de constater que les femmes représentent déjà plus de 40% de la relève.